Nicolas Faure

24 novembre 2021

Photos: Benoit Guenot

Text: Patrick Lebas

Reportage en intégralité à retrouver dans MONOPOLE 

La Bourgogne est décidément frustrante. Il y a tant ici de crus canoniques, de personnages singulièrs et si peu, trop peu, de flacons. Vous pourrez lire, vous aurez du mal à canonner. La Bourgogne cultive cette rareté avec courtoisie. Elle laisse néanmoins une place, une petite place, à quelques audacieux. Présentons l’intrépide Nicolas Faure. Intrépide peut-être, extra-terrestre sûrement. La terre, Nicolas y passe pourtant l’essentiel de son temps. Amoureux inconditionnel de la nature. Après une journée de boulot bien rempli, il rempile pour s’occuper de son hectare trente. Vous l’avez compris, Nicolas mène une double vie avec une facilité déroutante. Le jour, il est chef de culture du domaine Bertaut-Gerbet, à Fixin, une exploitation gérée par son épouse, Amélie. Le soir, il repart arpenter ses parcelles à Nuits, Pernand, Aloxe… « Je taille toutes mes vignes tout seul. C’est la base. Avant je labourais mais je n’arrivais plus à suivre », concède-t-il. Extra-terrestre, c’est sûr…

Sa passion lui vient de son père, propriétaire d’une cave en Lorraine. Il l’initie aux crus bordelais, leur région d’origine, mais pas que… Nicolas se rend assez vite compte que la vente, ce n’est pas trop son truc, davantage attiré par l’argilo-calcaire, les limons, la vigne. « Ça m’a fait mal au cœur de ne pas reprendre la cave de mon père mais je ne me sentais pas… » En 2004, il rejoint la « Viti », à Beaune et c’est parti pour un tour : Nouvelle-Zélande, à Saint-Émilion, chez Jean-Louis Chave… et puis retour en Bourgogne, au Domaine de la Romanée-Conti puis chez Prieuré-Roch, excusez du peu.

Il modère : « La DRC, c’était un stage de tractoriste ». « En 2011, j’ai l’opportunité de récupérer une parcelle de Nuits-Saint-Georges. L’histoire commence comme ça. Je n’avais pas de bâtiment, pas de cave, rien… En 2014, il se développe, investit tout ce qu’il gagne avec « ce que j’avais les moyens de m’acheter, rie-t-il, pas de premiers ni de grands crus mais de belles terres et des belles appellations régionales ». Cinq mille cols sont embouteillés dans le meilleur des cas, presque toutes vendues à l’étranger. Et nada pour les particuliers. « Pas le temps ». Des vins rares qu’on vous dit. Grossir ? Impossible. L’agenda est blindé. Le négoce, « je ne me retrouve pas là-dedans. J’ai envie d’avoir mes propres vignes, mon raisin », fouler ses rangs passionnément. « Pour se développer, il faut s’entourer. Faire pousser de la vigne, c’est simple, gérer ce qu’il y a autour l’est beaucoup moins : recruter, manager, c’est le point le plus compliqué du métier. Je ne peux pas me permettre de payer quelqu’un avec des gamays à neuf balles ». Nicolas est « heureux comme ça » et se concentre sur la base, la culture. Il tente alors des choses, comme lorsqu’il plante 10 ares d’aligoté dans une parcelle de Pernand village : « parce que je suis convaincu que si on veut faire avancer l’aligoté, ce n’est pas en le plantant à côté du maïs et du colza dans la plaine ». Intrépide mais pas fou, il a tout de même planté 20 ares de chardonnay… Ses vins sont comme lui, expressifs et fougueux, peu sulfités pour ne pas les brider : « pas un chardo standard » ; un gamay classieux planté à Nuits ; un Aloxe envoûtant… des flacons dotés d’une belle personnalité et cette devise inscrite sur le linteau de la porte du domaine Berthaut-Gerbet qui lui colle à la peau : « Bien faire vaut mieux que dire ».

Burgundy is decidedly frustrating. There are so many canonical wines here, with singular characters and so few, too few bottles. You can read about them, but you will have trouble drinking. Burgundy cultivates this rarity with courtesy. Nevertheless, it leaves space, a little space, for a few daring individuals. Which is where the intrepid Nicolas Faure comes in. Intrepid he may be, but he is definitely not of this world. And yet the earth is where Nicolas spends most of his time, as an unconditional lover of nature. After a full day’s work, he then heads back to take care of his 1.30 hectare. You may have guessed that Nicolas leads a double life with disconcerting ease. During the day, he is the head of cultivation at the Bertaut-Gerbet estate in Fixin, a business managed by his wife, Amélie. Come the evening, he sets out again to roam his plots in Nuits, Pernand, Aloxe… “I prune my vines myself. That’s a start. Before, I used to plough, but I couldn’t keep up”, he admits. Not of this world, clearly…

He gets his passion from his father, the owner of a cellar in Lorraine. He introduced him to Bordeaux wines, their region of origin, but not only that… Nicolas quickly realised that sales were not his thing, and that the clay and limestone, the silt and the vines were more attractive. “It broke my heart not to take over my father’s cellar, but it didn’t feel right…” In 2004, he joined the “Viti” in Beaune and off he went: to New Zealand, to Saint-Émilion, to Jean-Louis Chave… and then back to Burgundy, to the Romanée-Conti estate then on to Prieuré-Roch, no less. He explains:

At Romanée-Conti, it was a tractor driver training course”. “In 2011, I had the opportunity to take over a plot in Nuits-Saint-Georges. And that’s how the story started. I didn’t have any buildings, a cellar, nothing …” In 2014, he expanded, investing everything that he earned in “anything that I could afford to buy”, he laughs, “no premiers or grands crus, but good land and good regional appellations”. At best, he bottles 5000 bottles, almost all sold abroad. And nada for individual buyers. “I don’t have the time”. Rare wines, as we said. Getting bigger? Impossible. His timetable is packed. As for trading, “Not my thing. All I want is my own vines, my grapes”, to tread his rows with passion. “To grow, you have to surround yourself. Making the vine grow is simple, but managing everything around it is a lot less so: recruiting, managing, that’s the hardest part of the job. I can’t afford to pay someone when I sell Gamays for £9”. Nicolas is “quite happy like that” and concentrates on the basics, cultivation. He then tries things out, like when he planted 10 ares of Aligoté in a Pernand village plot: “because I am convinced that if you want to allow Aligoté to develop, we’re not going to do it by planting it beside corn and rape seed on the plains”. Intrepid but not mad, he nonetheless planted 20 ares of Chardonnay… His wines are like him, expressive and fiery, with little sulphite so as not to restrain them: “Not a bog-standard Chardo”; a classy Gamay planted in Nuits; a bewitching Aloxe … bottles endowed with a beautiful personality, and the motto inscribed on the lintel of the doorway to the Berthaut-Gerbet estate that never leaves him: “Doing it well is worth more than saying it”.

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